Géognose

 

 

Définition

 

La géognosie est d’après Littré : " La science traitant de la composition minéralogique, de la structure, de la forme et étendue des diverses couches ou groupes de masses minérales qui constituent la partie solide du globe terrestre".

 

White confère un sens poétique à ce terme géologique : "Il y avait aussi un deuxième aspect peut-être plus solitaire celui-là, que j'appellerais maintenant géo-gnose, un effort pour approcher d'un territoire*, pour cerner un pays, pour me rapprocher d'un monde*, d'une réalité, pour sortir de moi, en fait...", Cosmose, p. 66.

 

 

voir Géopoème, Géopoétique, Monde, Territoire, Topologie poétique

 

 

Principales occurrences

FD, p. 215 ; PA, p. 317, p. 322, p. 329, p. 335 ; PC, p. 22, p. 32, p. 166 ; CG, n°2, p. 75 ; CG, n°2, p. 75, 80, 85 ; Cosmose, p. 66 ; Incisions III, p. 26 ; Préface à Carl Gustav CARUS, Voyage à l’île de Rügen, Premières Pierres, p. 13


Citations

"J'ai passé toute mon enfance sur cette côte de l'ouest, juste en face de l'île d'Arran dont parle le poème. Et mon grand désir dès le commencement était de voir dans cette côte, d'en tracer les lignes - psychocosmographiquement*, si je puis dire, géognostiquement", FD, p. 215.

"Sortir de l'humanité pour retrouver le monde (et ce sera pour le plus grand bien de l'humanité !), sortir de l'histoire pour retrouver la géographie, la géo-gnose", PC, p. 22.

"Il m'est arrivé de parler de géognose et de géopoétique. Et à la recherche de la « terre de lumière » (dans la tradition celte, moins bien connue et plus caricaturée - parce que sa proximité gêne ? - que la chinoise ou l'iranienne, on disait gwenved, le monde blanc*), je suis allé au nord, au sud, à l'est et à l'ouest. Une lecture hermétiste des lettres du mot Adam (l'homme « primordial ») donne ces quatre directions cardinales...", PC, p. 166.

 

Commentaires

Dans Une Apocalypse tranquille, White évoque son "itinéraire gnostique" : "Si, dans le contexte épistémologique occidental d'aujourd'hui, une certaine pensée orientale, conceptualisable, s'il le faut, à notre manière, se révèle être non seulement utile, mais encore le langage même du monde qui surgit, on peut trouver une façon de penser et d'être équivalente à quelques détails près, sinon dans la philosophie monumentale et systématique occidentale, du moins dans ses marges, dans sa « gnose », ou dans sa « mystique »", AT, p. 219.

Dans un chapitre consacré à Humboldt, White aborde la géognose dans son sens premier c'est à dire de "configuration du terrain" (PA, p. 317). Il commente ainsi cet usage : "Humboldt, comme on l'a constaté, utilise assez souvent le terme « géognose », mais là aussi, le sens est très spécifique - il s'agit de la configuration de la terre, non pas de la configuration d'un nouvel esprit général des choses. Au cours de son voyage, Humboldt avait été abordé par des gens munis de vagues et confuses notions d'astronomie et de physique et qui voulaient parler de « nouvelle philosophie » - il trouvait cela absurde, comme il aurait trouvé absurdes tant d'autres « nouveautés ». Pour des raisons que j'ai déjà évoquées tout au long de cet essai et de ce livre, et pour d'autres qui vont émerger encore, je pense que le terme le plus adéquat est « géopoétique* »", PA, p. 335.

 

Cheminement critique

Michèle DUCLOS confirme l'évolution de la notion dans l’œuvre : "La géognose et la biocosmopoésie* sont devenues la géopoétique*", KW, p. 271. Pierre JAMET, LGOKW, Le fils de la terre et le géo-gnostique, LGOKW, p. 360-382 ; Nicolas DUPIN, MOKW, p. 68.
Voir aussi sur notre site Régis POULET : De la géologie à la géopoétique.

 

 

Géomental

 

 

Définition

 

Néologisme désignant le rapport entre la psyché et le monde : « un sens spatial du moi », RB, p. 164.

 

 

voir Géopoétique, Paysage mental, Psychocosmique, Psychogéographie

 

 

Principale occurrence

RB, p. 163

 

Citation

"Que suis-je venu faire ici ? J’ai du mal à répondre. Disons : des méditations géomentales", RB, p 163.


Commentaires

La seule occurrence du terme géomental se trouve dans La Route bleue. Il est donc contemporain de l’apparition du concept de géopoétique : "Automne 1979. Je voyage à travers les Laurentides, en route pour le grand espace blanc du Labrador. Une nouvelle notion en tête : celle de géopoétique. L'idée qu'il faut sortir du texte historique et littéraire pour trouver une poésie de plein vent où l'intelligence (intelligence incarnée) coule comme une rivière", SP, p. 198. Géomental peut ainsi raisonnablement être classé parmi les nombreux termes préfigurateurs de la géopoétique.

 

Cheminement critique

"Le long de cette Route bleue, White s’interroge :

Que suis-je venu faire ici ? J’ai du mal à répondre. Disons : des méditations géomentales.

Pour préciser ensuite :

C’est un sens spatial du moi que j’essaie de développer ici, sur le plateau du Labrador", Nicolas DUPIN, MOKW, p. 82.

 

 

Géopoème,

Géopoésie

 

 

Définition

 

Néologisme : "Parlons plutôt de « géopoésie » (géognose*) ou bien, pour utiliser un terme de Whitman, « poésie du cosmos »", Incisions III, p. 26.

 

 

voir Cosmopoème, Géognose, Géopoétique, Géopoéticien

 

 

Principales occurrences

PA, p. 118 ; PC, p. 28, p. 63 ; SMF, p. 101 ; Incisions III, p. 26 et 70 ; L'espace premier, carton d'invitation de l'exposition Riopelle, Galerie Maeght, 1980

 

Citations

"C'est par la géographie, disons par une géo-poésie, qu'on sortira peut-être de notre sclérose historico-culturelle", PC, p. 28.

"Je parle en termes de géopoésie. Tandis que « rural », « rustique » - je ne peux pas dire que ça m'excite beaucoup l’esprit…", PC, p. 63.

"Ailleurs, il y aura une sorte de poésie des noms de lieux, un géopoème rudimentaire : « Garonne - Dordogne - Loire - Rhône - Drôme – Durance », « Kotzebue – Cape Blossom – The Artic Circle – Nimiuk Point – Pipe Spit », « Ringdom Gompa – The Penzi Pass – The Sanskar Valley – Ating Gompa – Huttra – The Muni Glacier – Machail – The Chander Bhaga River »", PA, p. 118.

"C'est en effet en termes de cosmo-poésie* et de géo-poésie que je parlerai de ce film, dans lequel il s'agit d'une remontée (trois mille kilomètres) du Missouri vers les hautes terres du grand Nord-Ouest", SMF, p. 101.

"Qui ne sait pas lire dans la poésie de la peinture (cette géo-poésie gestuelle) n'aura jamais rien compris à la peinture", L'espace premier, carton d'invitation de l'exposition Riopelle, Galerie Maeght, 1980.

 

Commentaires

Dans le vocabulaire de l’auteur, la géopoétique* va progressivement supplanter la géopoésie pour les raisons mêmes qui ont fait que White a toujours préféré le terme de géopoéticien à celui de géopoète : "C'est une des raisons pour lesquelles je tiens à dire « géopoéticien* », et non pas « géopoète », mot qui laisserait la porte ouverte à toute une poésie vaguement géographique (préférable certes à tant de fantaisies personnelles, mais ne menant pas très loin), mais, surtout, mot restrictif, qui cantonnerait la géopoétique* dans la poésie alors que son champ d'application est beaucoup plus étendu", Autre Sud, n°45, Juin 2009, p. 3.

 

Cheminement critique

"Un poème, un «géo-poème», n’est pas seulement un texte qui parle de la Terre, qui décrit ou évoque les choses du monde*. C’est une expression qui nous met en contact avec le langage-du-monde, nous rappelle, nous redonne la preuve de l’expressivité inhérente au monde. Un poème est une façon d’écouter, de comprendre, de parler le langage du monde", Georges AMAR, CG, n°3, p. 26.

 

 

Géopoéticien

 

 

Définition

 

Néologisme désignant celui qui œuvre dans le champ de la géopoétique* : "Le géopoéticien, la géopoéticienne, est engagé(e), en dehors du contexte sophistiqué ou vulgaire de la modernité finissante, dans une aire* aux coordonnées variables et complexes. En suivant les pistes du nomadisme intellectuel*, en traversant les champs de la géopoétique*, il/elle essaie de sortir de l'histoire pathologique pour ouvrir un espace existentiel, intellectuel, artistique, culturel, qui soit plus frais, plus respirant, plus stimulant, plus inspirant", Carnet de bord, n°2, Printemps 2004, p. 2.

 

 

voir Aire la plus difficile, Géopoétique, Nomade intellectuel, Nomadisme Intellectuel

 

 

Principales occurrences

AE, p. 57 ; DD, p. 49 ; DEN, p. 54, p. 62 ; PA, p. 27, p. 39, p. 41, p. 131 ; RC, p. 234 ; CG, n°5, p. 5 ; CG, Géopoétique et Arts plastiques, p. 10, p. 13 ; CG, Série Colloques, L'Autre Amérique, p. 140 ; KW, Latitudes, n°2, p. 19 ; Latitudes, n°6, p. 31, p. 36, p. 43 ; Carnet de bord, n°2, p. 2 ;Lisières, p. 42


Citations

"Je n'ai pas suivi le parcours chronologique de ce délire, j'ai essayé en logicien géopoéticien, d'en dégager une structure", DD, p. 49

"Le but des iconoclastes byzantins était d'atteindre une parfaite transcendance au-delà de l'intervention, de l'intermédiaire, d'une iconologie trop humaine. Peut-être pourrait-on dire que le but de « l'iconoclaste » géopoéticien, c'est d'arriver à une parfaite immanence", CG, Géopoétique et Arts plastiques, p. 13.

"La poétisation du géopoéticien procède à la fois de l'investigation (la veritas facti de Leibniz) et de l'intuition (veritas essentiae), et elle emploie la langue, elle laisse se mouvoir la langue, d'une manière à la fois souple et dense", Latitudes n°6, p. 31.

"Le géopoéticien reste, selon le mot de Nietzsche « fidèle à la Terre », planète à la fois complexe, subtile et belle", Latitudes n°6, p. 43.

"C'est ici que le nomade intellectuel* se mue en géopoéticien - je dis géopoéticien, comme on dirait logicien ou mathématicien, afin d'indiquer à la fois une sortie des ornières et des marécages de ce que l'on nomme ordinairement « poésie » de nos jours, et un champ de langage général où pourraient se retrouver ces langages séparés que sont ceux de la science, de la philosophie et de la poésie", extrait du discours inaugural de la 25ème Biennale de Poésie, Liège, 2007.

 

Commentaires

Signalons encore une fois que la dénomination « géopoète » est récusée par Kenneth White : "C'est une des raisons pour lesquelles je tiens à dire « géopoéticien* », et non pas « géopoète », mot qui laisserait la porte ouverte à toute une poésie vaguement géographique (préférable certes à tant de fantaisies personnelles, mais ne menant pas très loin), mais, surtout, mot restrictif, qui cantonnerait la géopoétique* dans la poésie alors que son champ d'application est beaucoup plus étendu", Autre Sud, n°45, Juin 2009, p. 37. En 2004 déjà, lors d'un colloque tenu à Genève, White avait précisé : "C'est dire, s'il le faut encore, que la géopoétique est plus qu'une poésie vaguement géographique, ou qu'une géographie vaguement poétique, qui constituerait une section spéciale de la littérature, la spécialité de « géopoètes » (terme que je n'ai jamais employé, mais que je trouve ici et là dans les journaux)", Marche et paysage, Les chemins de la géopoétique, dirigé par B. Levy et A. Gillet, Metropolis, 2007, p. 25.

 

Cheminement critique

"Dans l'essai publié en 1989 par la London Review of Books, « From an Outpost », White qualifie le poète de « wayman, alias earth-poet » : homme de la voie, poète de la terre. Le terme de « géopoéticien » est encore peu acclimaté", Michèle DUCLOS, KW, p. 235.

 

 

Géopoétique

 

 

Définitions

 

Le terme même de géopoétique est un néologisme. Comme le précise White : « L’idée était latente et la pratique à l’œuvre depuis le départ, et le mot avait surgi inopinément ici et là dans ma bouche et sous ma plume autour de la fin des années soixante-dix. Il semblait « cristalliser » un grand nombre d’éléments divers et flottants. Il m’a été signalé récemment que ce mot était déjà apparu d’une manière fugace dans d’autres contextes, aussi bien littéraires que scientifiques. J’en prends note. Mais ce n’est pas une paternité que je revendique, c’est une poéticité. Non pas un mot, mais le développement d’un concept », PA, p. 13.

 

White a donné plusieurs définitions de cette notion unificatrice et plurivoque dont celles-ci : "La géopoétique est une théorie-pratique transdisciplinaire applicable à tous les domaines de la vie et de la recherche, qui a pour but de rétablir et d’enrichir le rapport Homme-Terre depuis longtemps rompu, avec les conséquences que l’on sait sur les plans écologique, psychologique et intellectuel, développant ainsi de nouvelles perspectives existentielles dans un monde refondé", (site www.kennethwhite.org).

 

"Une tentative de renouveler la culture, de créer un nouvel espace culturel, en revenant à la base sur laquelle nous essayons de vivre, la Terre même. Il s'agit d'établir avec ce "fonds" le rapport le plus sensible, le plus intelligent, le plus subtil possible. Ensuite, de trouver le langage de ce rapport. Trois étapes donc : contact, approfondissement et amplification, expression. La géopoétique ouvre un champ nouveau dans les sciences, dans la philosophie, dans la littérature et les arts plastiques. Elle vise en fait à un nouveau "grand champ" général, au-delà des cloisonnements établis", Lexique géopoétique, Poésie 98, Octobre, n°74, p. 17.


Voici trois définitions données lors d'une conférence : « Sur la géopoétique des fleuves » (Lyon, octobre 2011)

Première définition 
:

« La géopoétique est une théorie pratique transdisciplinaire applicable à tous les domaines de la vie et de la recherche, qui a pour but de rétablir et d’enrichir le rapport homme-terre depuis longtemps rompu — avec les conséquences que l’on sait sur les plans écologique, psychologique, intellectuel et social, développant ainsi de nouvelles perspectives existentielles dans un monde ouvert.»

Seconde définition

« La culture (au sens profond du mot) a été fondée jusqu’ici sur trois puissances : le mythe, la religion, la métaphysique ». On parle ici d’une culture qui fasse « vivre plus et plus profondément. Aujourd’hui elle n’est fondée sur rien, il n’y a plus de base générale, et pour dire les choses plus brutalement nous avons une production culturelle sans culture. » Ainsi « la géopoétique propose un nouveau fondement ».

Troisième définition :

« La géopoétique est à la fois l’étude de l’organisation inhérente à l’univers, la formation d’un monde humain et l’expression de cette formation. La poétisation du géopoéticien procède à la fois de l’investigation et de l’intuition. La géopoétique emploie la langue d’une manière à la fois souple et dense. » Par poétique « j’entends une dynamique fondamentale de la pensée » — d’où l’existence d’une poétique de la littérature, de la philosophie, des sciences, une poétique de la politique (pas pour demain cependant ajoute, complice, Kenneth White). Le géopoéticien se situe d’emblée dans l’énorme, l’encyclopédique. Mais il faut une force qui permette de charrier le quantitatif. Énorme est à prendre au sens de grand, mais aussi é-norme en dehors des normes : « en véhiculant énormément de matière terrestre avec un sens élargi des choses et de l’être, la géopoétique ouvre un nouvel espace de culture, de pensée et de vie, en un mot : un monde ».

 

 

 

voir Biocosmopoétique, Cosmoculture, Géognose, Géopoème, Poétique du Monde

 

 

Principales occurrences

AT, p. 26 ; CS, p. 9 ; DEN, p. 21-23, p. 33 ; EB, p. 89 ; EN, p. 178, p. 279-280 ; FE, p. 89 ; H, p. 116 ; LCGT, p. 32-33 ; LP, p. 60, p. 76 ; PA, p. 11-12-13, p. 27, p. 197, p. 229 ; PC, p. 123, p. 160 ; PE, p. 191 ; SP, p. 161, p. 198, p. 200, p. 201 ; TC, p. 11 ; Carnet de bord, n°3, p. 2 ; n°5, p. 3 ; latitudes n°5, p. 23 ;ALH, p. 334-342



Citations

"La géopoétique, c'est le corbeau de la vacuité volant à travers les mondes sensibles", SP, p. 161.

"Il faut essayer de concevoir un ordre-désordre, un pattern changeant. C'est vraiment quelque chose d'esthétique en dernier ressort", PC, p. 160.

"Géopoétique / Ce que Mallarmé / avait appelé / « l'explication orphique / de la terre » / mais plus près / de l'os, de l'aile / de la vague / et de la pierre", PE, p. 191.

"Et puis, au bout de tout le processus, la géopoétique pourra être considérée comme une nouvelle science globale, qui fait le pont entre les sciences séparées", LCGT, p. 32.

"En fait, de mon point de vue, phénoménologie, topologie de l'être, anthropologie fondamentale et autopoétique constituent des pistes d'approche de cette « science-art » que j'appelle la géopoétique", PA, p. 197.

"De temps en temps, on me demande une définition succincte de la géopoétique. En voici une, qui pourrait figurer dans un dictionnaire : « Tentative d'ouvrir un nouvel espace culturel en revenant à ce qui constitue la base même de la culture, à savoir le rapport entre l'esprit humain et la Terre, ainsi que le développement de ce rapport sur les plans intellectuel, sensible et expressif »", Carnet de Bord, n°3, Printemps 2005, p. 2.

"S’il fallait tenter une définition de dictionnaire, je dirais ceci : « Etude des rapports intellectuels et sensibles entre l'homme et la Terre, en vue de l'élaboration d'un espace culturel harmonieux »", LP, p. 76.

 

Commentaires

C’est en février 1979 que White a prononcé publiquement le terme pour la première fois dans le cadre d'une lecture-spectacle poétique (Le Monde blanc - itinéraire et textes) donné à Paris sous l'égide du Nouveau Commerce (cf. EN, p. 278 ; MB). White rapporte ainsi la genèse de la notion : "Automne 1979. Je voyage à travers les Laurentides, en route pour le grand espace blanc du Labrador. Une nouvelle notion en tête : celle de géopoétique. L'idée qu'il faut sortir du texte historique et littéraire pour trouver une poésie de plein vent où l'intelligence (intelligence incarnée) coule comme une rivière", SP, p. 198. Pour plus de détails sur cette conception, se référer au passage intitulé Approche de la géopoétique dans L'Esprit Nomade, p. 278 et dans Le Plateau de l’albatros, p. 13.

White a longtemps évité de donner une définition fixe, prématurée, de la géopoétique : "Ce que je n'ai pas donné, c'est une définition, et telle n'est pas mon intention. Des définitions partielles et passagères surgiront sans doute ici et là dans ces pages. Mais une définition globale serait contraire à la logique de l'ouverture en cours", PA, p. 40.

On savait pourtant très précisément ce que la notion ne recouvrait pas : "[...] La géopoétique n'a rien à voir avec un néo-chamanisme quelconque. Elle ne se réduit pas non plus à un lyrisme géographique, ou à une géographie lyrique, ou à une vague "poésie de la nature". La géopoétique ne se cantonne ni dans "la poésie" ni dans "l'art" surtout selon les conceptions courantes de ces activités (de grâce, pas de Land Art dans les grottes ! - laissons le karst tranquille). C'est une discipline transdisciplinaire, une philosophie, une anthropologie", KW, De la préhistoire à la post-histoire, Latitudes n°5, L'Atelier du Héron, 2007, p. 23.

 

Cheminement critique

Kenneth WHITE et Régis POULET, PG. Michèle DUCLOS, KW, p. 258-264.





Goélandais

 

 

Définition

 

Néologisme

 

« Langue » parlée par les goélands.

 

 

voir Académie des Goélands

 

 

Principale occurrence

MM, p. 207


Citation

A propos de Jack Kerouac : "Mais pour le moment, je me contenterai de ceci : OK, Jack, tu as fait de ton mieux, merci, vieux - et à un de ces jours, peut-être, dans un bar du cosmos, quelque part au nord de Los Angeles. Je te donnerai des nouvelles de l'Armorique, en goélandais", MM, p. 207.

 

Commentaires

"Quand j'étais enfant (c'est à dire pas encore "doué de parole", pas encore "maître du langage" - l'est-on jamais ?), mon plus grand plaisir était de quitter mon village sur la côte ouest de l'Ecosse et de m'en aller soit vers un coin reculé du rivage, soit dans les bois ou dans les collines de l'arrière-pays. Là, après avoir écouté attentivement, j'essayais d'imiter le langage des phoques, des mouettes, des hiboux... Il y avait là un désir d'étendre le langage humain, un désir d'intégrer l'humain à un contexte plus large que le contexte social. Longtemps, bien longtemps après, je me suis rendu compte qu'en agissant de la sorte, j'étais porteur d'une vieille nostalgie humaine. Jacob Boehme parle du « langage des oiseaux », dont l'homme a perdu le savoir. Dans nombre de traditions, sinon dans toutes, il est question d'un langage partagé par les hommes et les animaux. Je ne crois pas à ce mythe. Mais j’y reconnais un désir profond. Et je continue ma pratique « archaïque »", AL, p. 5. Voir aussi, LCGT, p. 78.

Dans son Eloge du Corbeau, White conclut ainsi : "Tous les oiseaux parlent / la langue de l'aurore / dans des dialectes divers", A, p. 27. On pourra se référer également au dialogue des mouettes dans le poème En passant devant l'université de Glasgow, TD, p. 147.

 

Cheminement critique

Anne BINEAU, La figure de l'oiseau dans l’œuvre de Kenneth White, HKW, p. 39-68.

 

 

 

Grand Rivage

 

 

Définition

 

Au cours d'un entretien, White répond ainsi à une question posée sur son installation en Bretagne : "J'y vois en tout cas le début d'un troisième cycle. Et l'intensification de mon intérêt pour une certaine géographie : celle de la côte ouest de l'Europe, qui va des côtes portugaises jusqu'aux archipels* écossais. Ce que j'appelle le grand rivage. La Bretagne est placée au milieu de tout cela. Peut-être que c'est une position stratégique pour moi", PC, p. 148.

 

 

voir Atlantique, Littoralité

 

 

Principales occurrences

A, p. 133 ; LP, p. 48 ; PC, p. 18, p. 31, p. 32, p. 95, p. 121, p. 148, p. 201 ; Fanal, p. 16 ; Latitudes n°6, p. 28 ; Lettres du Ponant, Terres de Brumes, 1999, p. 172



Citations

"En quittant la Grande-Bretagne, j'ai écrit un long poème, Le Grand Rivage. Je continue à marcher le long de ce rivage, qui est comme une grande marge sur la page surinscrite, ultracodifiée du monde*", Lettres du Ponant, Terres de Brumes, 1999, p. 172.

"Beaucoup me prennent effectivement pour le spécialiste du poème « diamantin », voire du haïku. J'éprouve donc toujours le besoin de rappeler que le long poème m'intéresse, parfois même le très long poème. Je pense bien sûr au Grand Rivage qui pour moi n'est pas un livre de poèmes mais un seul poème de 53 sections. A travers Atlantica, je renoue donc avec Le grand rivage (ces deux livres sont d'ailleurs géographiquement situés sur le même territoire) mais également avec Mahamudra*", PC, p. 121.

 

Commentaires

Le Grand Rivage est donc aussi le titre d'un long poème en 53 sections édité en 1980 au Nouveau Commerce. Ce recueil est tout d'abord paru en Grande-Bretagne dans une édition d'art à tirage limité sous le titre A Walk along the Shore (Circle Press, Surrey, England, Edition limitée à 95 exemplaires. Sérigraphies de John Christie, 1977).

Pour White : "Le Grand Rivage pose la question de fond, qui est aussi la question du fond : sur quoi peut-on fonder, sur quel terrain peut-on cheminer de la manière à la fois la plus profonde et la plus ouverte ? Une de ses épigraphes est tirée de Maître Eckhart : « Avance dans ton propre territoire et apprends à te connaître ». C'est justement ce « propre » qui pose question", Latitudes n°6, p. 28.

 

Cheminement critique

Michèle DUCLOS, "Quant au Grand Rivage, probablement l’un des plus beaux longs poèmes du XXème siècle, il est lié intimement à une longue marche méditative le long de la côte ouest de l’Écosse", Entretien avec Kenneth White, La marche, 9 mars 2007, Temporel n°3.

White a donné des pistes d'interprétation du poème dans le texte Le long du grand rivage, SP, p. 123-127. Voir aussi : Hugues ROBAYE, En arpentant Le Grand Rivage : l'autopoétique de Kenneth White, KWG, p. 9-20 ; LKW, p. 276 ; HKW, p. 50 ; l'entretien avec Claude VIVIEN publié dans PC, p. 27-32 et intitulé Grand Geste, Grand Rivage ; MOKW, p. 150.